Le Passe Muraille

L’échappée d’António Luís Moita

 

Pastorale

Dans la pinède où le vent se dénude, dans le silence desséché où les corbeaux croassent, le cycle recommence.
Un fils nous renaît, quelque part, très loin d’ici.

Ce n’est pas trop tôt, je sais (déjà, pour nous, glisse le soir dans l’air que l’on respire, dans la pinède où le vent se dénude, et se ferment les lèvres, pour toujours, aux mots impurs).

Je noue, cependant, tes mains aux miennes — coquillage commun, deux libertés difficiles —et j’y bois et je t’y donne à boire, obstinément, la vie.
Puis, je replonge en toi.

Exil

Tout seuls, à des millions de vers-lumière d’une étoile si proche, quêtons-nous, dans la chair provisoire que nous sommes, d’autres effrois que ceux des os à nu ?

Parmi des roses brèves où gît la nuit, des oiseaux qui succombent et des vaisseaux qui jettent l’ancre en vain dans les rivières pour aller se dissoudre dans la mer dont ils sont aussi faits, nous bâtissons des ponts, des dieux, des mythes, des demeures, poème obscur que nul n’apprend par coeur.

— Celui qui dispensait le rêve et l’aile s’est tu, nous a quittés. A tout jamais.

Poèmes traduits du portugais par Luiz-Manuel

 

(Le Passe-Muraille, Nos 11-12, mars 1994)

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