Le Passe Muraille

Destination Cendrars

Nupur,

poème de Blaise Cendrars

 

Nous sommes suspendus entre le ciel et la mer dans le chant des rossignols
Raymone et moi
Et évoquons Paris
Et parlons des gens que nous avons connus
Et pour ne pas rire ou pleurer
Et ne pas gâcher les mystères de l’existence
Nous nous balançons sans plus rien dire
La grande ville — Saint-Segond
Nous nous laissons aller
Aller et venir
Nous nous balançons en silence
Portés par le baume des orangers en fleurs

Hamacs aux mouvements contraires dont pend
Une main
Une gourmette
Une cigarette

Trou d’air
Trou dans la mémoire
Trou
On plane
On monte
On tombe
Trou dans la nuit
Trou de serrure
Une étoile sur la mer
Une touffe de lavande au sol
Une parole en l’air
Les mailles du filet

Trou
Trous
La robe se déchire
On se pâme
Et se pâmait aussi le vieux saint homme qui s’était retiré dans la solitude du Pamir

Dans la dernière ville
Avant de s’engager sur le sentier qui devait le mener dans les hautes solitudes des montagnes de la frontière
Et, traversant la dernière ville, il avait levé les yeux sur une bayadère qui lui souriait
Et voici que maintenant il…

(1er mai 1949)

 

(Le Passe-Muraille, Destination Cendrars, Numéro 51, Décembre 2001)

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