La douleur
I
En ce temps-là
semaine après semaine
un train m’emmenait
jusqu’au lit de mon père
Maintenant c’est toi qui souffres
dans le lit voisin
mais il n’y a pas de train pour te rejoindre
La douleur est un pays lointain
(Pour Gabriel, décembre 2000)
II
En cette nuit de Noël
la plainte d’un oiseau
m’a réveillée
J’ai tendu l’oreille
vers la fenêtre ouverte
guettant dans le noir
Jusqu’à ce que je réalise
que c’est en ton sommeil
qu’il gémissait
l’oiseau
dans la cage de tes côtes
(25 XII 2000)
III
La compassion
seule
relie à la souffrance
passage étroit
goulet d’étranglement
où le cœur sec
renâcle :
«souffrir avec »
(25 XII 2000)
IV
Ton corps
a gardé la mémoire
du lent travail
des femmes :
plainte, gémissement
Je l’entends chaque nuit
Mais qui t’apprendra
le doux halètement
léger
rapide
qui précède la délivrance ?
(Janvier 2001)
Denise Mützenberg
(Le Passe-Muraille, No 70, Juillet 2006)